L’article 15.2 de la Loi sur le divorce permet aux tribunaux d’ordonner le versement d’une pension alimentaire pour ex-époux, dans le cadre d’une demande de divorce, en tenant compte de ressources et des besoins des époux et notamment des facteurs suivants :
Art. 15.2 (4) Loi sur le divorce :
a) la durée de la cohabitation des époux;
b)les fonctions qu’ils ont remplies au cours de celle-ci;
c)toute ordonnance, toute entente ou tout arrangement alimentaire au profit
de l’un ou l’autre des époux.»
Cette pension ne constitue toutefois pas une rente viagère, soit une rente à vie, et peut donc faire l’objet d’une ordonnance modificative permettant de la suspendre, l’annuler ou la modifier.
Dans le jugement de la Cour d’appel Droit de la famille — 141364, 2014 QCCA 1144 (CanLII), la Cour expose le cadre analytique applicable lors d’une demande de modification d’une pension alimentaire pour ex-époux.
- Démontrer un changement important dans les ressources ou les besoins de l’un des époux depuis l’ordonnance de la pension alimentaire;
- Déterminer la modification à apporter à la pension alimentaire en fonction de l’importance du changement et basée sur les quatre objectifs de l’ordonnance modification tels que décrits à l’article 17 (7) de la Loi sur le divorce, soit :
«L’ordonnance modificative de l’ordonnance alimentaire au profit d’un époux vise :
- à prendre en compte les avantages ou inconvénients économiques qui
découlent pour les ex-époux du mariage ou de son échec;
- à répartir entre eux les conséquences économiques qui découlent du soin
de tout enfant à charge, en sus de toute obligation alimentaire relative à tout enfant à charge;
- à remédier à toute difficulté économique que l’échec du mariage leur
cause;
- à favoriser, dans la mesure du possible, l’indépendance économique de
chacun d’eux dans un délai raisonnable.»
À titre d’exemple, dans l’affaire Droit de la famille — 16214, 2016 QCCS 371 (CanLII), la Cour accepte de modifier à la baisse la pension alimentaire devant être versée à l’ex-épouse. En effet, monsieur a invoqué le fait qu’il prendrait éventuellement sa retraire a l’âge de 70 ans, ce qui constitue un changement important de situation.
En l’espèce, au moment du mariage, les époux avaient convenu que madame quitterait son emploi afin de se consacrer à la famille. Le divorce ayant eu lieu alors que madame avait atteint l’âge de 51 ans et le mariage ayant duré 28 ans, sa situation de dépendance économique est considérée comme une conséquence du mariage et de son échec. La Cour a donc réduit la pension alimentaire de 34 000$ par an à 24 000$ par année.
Bracklow c. Bracklow, [1999] 1 RCS 420, 1999 CanLII 715 (CSC), est un arrêt de référence en matière de pension alimentaire pour ex-époux. La Cour Suprême a établit dans cet arrêt les trois fondements de la pension alimentaire pour ex-époux, soit :
- Compensatoire;
- Non compensatoire;
- Contractuel;
- Compensatoire
Selon cette conception, les époux sont considérés comme indépendants en mariage et la pension alimentaire vise donc à compenser l’un des époux pour les inconvénients liés à l’échec du mariage.
La question qui se pose lorsque la possibilité d’accorder une pension compensatoire est évaluée, est de déterminer si l’ex-époux aurait été dans une situation plus avantageuse en demeurant marié. Lorsque la réponse à cette question est affirmative, une pension alimentaire sera accordée afin de compenser cette diminution de niveau de vie.
C’est le cas lorsque, comme dans l’affaire Droit de la famille — 16214 ci-haut exposée, l’épouse est demeurée, en raison du mariage, femme au foyer et l’époux a subvenu à ses besoins. Une pension doit donc être versée, puisque l’épouse se retrouverait sans ressource après le divorce, en raison des choix des époux durant le mariage.
Toutefois, une pension alimentaire compensatoire ne pourra être accordée lorsque la situation de la personne après le divorce est la même que si elle n’avait pas été mariée, mais le versement d’une pension alimentaire non compensatoire pourrait être ordonné.
- Non compensatoire
Cette conception de la pension alimentaire est fondée sur le principe d’obligation sociale fondamentale. En effet, dans certains cas, une obligation morale de subvenir aux besoins de l’ex-époux pourrait être attribuée à une partie, lorsque la dépendance économique de l’ex-époux ne résulte pas de l’échec du mariage.
Par exemple, dans l’affaire Droit de la famille — 16388, 2016 QCCS 735 (CanLII), les parties se sont divorcées après 19 ans de mariage. L’épouse souffrant d’une maladie qui l’empêchait de travailler, la tribunal a ordonné le versement d’une pension alimentaire en sa faveur, fondée sur la conception non compensatoire.
En effet, puisque la situation dans laquelle se trouve madame aurait été la même que si elle ne s’était pas mariée et ne découle donc pas des conséquences de l’échec du mariage, la pension est dite non compensatoire.
Lorsque la pension alimentaire est non compensatoire, le simple écoulement du temps peut être considéré comme suffisant pour permettre une demande en modification de la pension alimentaire, sans qu’un changement important se soit produit.
Toujours dans l’affaire précédente, bien qu’il n’y ait pas eu de changement important au niveau de la situation des parties, la Cour a accepté de modifier, pour éventuellement terminer, le versement de la pension alimentaire. En effet, puisque l’ex-époux effectuait des versements depuis 19 ans, soit le même nombre d’années qu’a duré le mariage, les tribunaux ont considéré qu’il avait acquitté son obligation morale envers l’ex-épouse et qu’il revenait maintenant au gouvernement d’assurer la subsistance de madame.
- Contractuel
Les tribunaux doivent tenir compte des ententes prises entre époux quand au possible versement d’une pension alimentaire suite à un divorce, dès lors que cette convention a été consentie de manière libre et éclairée.
Sirois & Boisvert avocats
(438) 386-4223
N’hésitez pas à nous contacter, pour connaître vos droits et prendre rendez-vous avec nous.